lundi 19 avril 2010

EFT la dépression vue par une psy professionnelle

Le Dr Patricia Carrington, ancien professeur de psychologie à l'Université de Princeton (USA), décrit les causes et traitements de la dépression, sans oublier la question des médicaments.
Patricia Carrington est l'un des plus anciens "EFT Masters" formés à l'EFT par Gary Craig. Voici sa présentation :

"Le Dr Patricia Carrington possède toute une richesse d'expertise et d'expérience à partager. Elle est un trésor d'idées, de chaleur humaine et de sagesse et, comme vous pourrez le voir dans son compte-rendu détaillé ci-dessous, elle a une expérience considérable en ce qui concerne la dépression. Elle expose les différents types de dépression, les défis uniques qu'ils représentent et la meilleure façon de les traiter. Même si elle utilise EFT dans la plupart des cas, elle donne aussi ses réflexions concernant la manière de travailler avec des cas vraiment difficiles qui ont besoin de médicaments.
"Un grand merci à Pat pour avoir pris le temps d'exposer son point de vue de manière si éloquente. Le contenu de ce texte peut ne pas intéresser tout le monde, mais, pour beaucoup d'entre nous, elle fait partie des "must" qu'il faut imprimer et conserver. Bien à vous, Gary".

Traduction de la page :
**http://www.emofree.com/depression/carrington.htm**

par le Dr Patricia Carrington

Puisque vous m'avez demandé des informations sur l'EFT et la dépression, j'ai fait le bilan de ma propre expérience avec des clients dépressifs. A ce jour, environ 90% de mes clients utilisent EFT pendant une bonne partie de presque toutes leurs séances de psychothérapie. Bien que je ne l'aie jamais vraiment précisé, je pense que maintenant je perçois une sorte de schéma (pattern) dans la réaction à l'EFT de ces clients qui ont été déprimés.
Les types de dépressions qui répondent le mieux à l'EFT sont (ou étaient) pour moi dans la catégorie qu'on appelle "dépression réactive" (pour ceux que cela intéresse, je n'utilise pas les termes de la classification du DSM IV pour la dépression, sauf quand je dois remplir un formulaire d'assurance maladie - je les trouve inutiles pour le traitement). Les "dépressions réactives" sont celles qui sont provoquées par un événement spécifique ou une série d'événements dans la vie d'une personne, et qui surviennent chez une personne qui en général n'était pas déprimée avant l'événement - comme leur nom l'indique, ce sont des REACTIONS à quelque chose. Ce "quelque chose" est généralement une perte ou la menace d'une perte. Ce peut être la perte d'une être cher ou de la carrière, ou d'argent, ou de sécurité, ou d'un membre (amputation), voire la menace d'une grave maladie chez un membre de la famille, ou encore la perte de la jeunesse ou même de l'avenir pour la personne. L'événement déclencheur provoque une forme de deuil de l'objet perdu, et le résultat est un sentiment de tristesse et de désespoir.
C'est le genre de dépression qui, selon mon expérience, se prête souvent remarquablement bien au traitement par EFT. C'est facilite d'utiliser le tapotage parce qu'il y a des limites identifiables, ce n'est pas quelque chose de vague ou de général, et il y a beaucoup de détails précis sur lesquels tapoter. Il est vrai que certaines personnes au début peuvent ne pas être consciemment en mesure d'identifier exactement ce que leur perte ou leur séparation douloureuse a été, mais la plupart des clients que je rencontre ayant ce problème peuvent le faire et me donner des détails précis, avec peu d'aide. D'autres n'en sont pas conscients jusqu'à ce que j'aie fouillé un peu dans leur vie pour savoir quand tout cela a commencé et ce qui se passait au moment où l'événement s'est produit, ou quelle a pu être la chose inquiétante qu'ils ont anticipée à ce moment, et ainsi la cause de leur tristesse intérieure profonde peut être découverte. Ces personnes peuvent ne pas pouvoir me préciser le déclencheur au premier abord, surtout si la dépression est survenue lors de "l'anniversaire" d'un événement désagréable ou pénible - les anniversaires sont scrupuleusement respectés par les mini-calculatrices de notre cerveau, même si nous ne nous en souvenons pas consciemment, et ils peuvent être source de gros problèmes.
Une autre raison pour qu'une personne n'identifie pas l'événement tout de suite, c'est qu'elle peut avoir minimisé l'impact réel de ce qui l'a dérangée - peut-être un ex-conjoint qui s'est remarié il ya trois mois lorsque la dépression a commencé et à l'époque elle n'a pas pris cela comme quelque chose qui pouvait la menacer (mais elle l'a été!), ou peut-être que le plus jeune enfant est parti à l'université et que la personne s'est retrouvée dans une maison vide, tout semblant parfait (mais ça ne l'était pas!), etc. Je trouve que ces événements déclencheurs émergent et s'identifient naturellement, et souvent très rapidement, au fur et à mesure que nous tapotons sur les sentiments de tristesse ou de vide, de découragement ou d'auto-accusation - ou sur quoi que soit qui peut apparaître. C'est comme si la vraie raison voulait "sortir", qu'elle n'attendait qu'un signal pour être vue et traitée. Bien sûr, une fois qu'elle est arrivée au grand jour, nous pouvons uiliser l'EFT et tapoter sur des problèmes spécifiques qui souvent peuvent être traités remarquablement vite, et avec eux la dépression s'en va. Voila!
Mais les choses ne sont pas toujours aussi simples, comme nous le savons tous. En dessous de la perte qui a déclenché la dépression peut se trouver une série d'autres pertes et séparations cachées dans les recoins sombres du passé. Certaines sont les pertes très précoce et extrêmement douloureuse pouvant survenir dans la petite enfance avant même que l'enfant ait eu des mots à mettre dessus. Si elles sont réactivées par une perte plus récente, alors elles représentent les forces motrices derrière la dépression et nous avons ici le réseau bien connu des aspects souvent multiples qu'il faut poursuivre à travers le tapotage. Parfois, je vais devoir aider un client à faire laborieusement ce travail et il faut beaucoup de patience, mais les bénéfices peuvent être énormes. Mais souvent cela va beaucoup plus vite que prévu. Le plus souvent, certains problèmes fondamentaux sous-jacents seront abordés et alors la dépression qui a amené le client à mon cabinet peut n'avoir été que le problème le plus évident, le "signal d'alarme" pour ainsi dire, qui a motivé cette personne à rechercher de l'aide. Une fois que l'aide (le traitement) est là, alors le sens profond de tout cela peut être abordé. Pour cela je dis : génial ! J'ai souvent constaté que ce processus est encore plus important que le déblayage des symptômes de dépression - maintenant, toute la vie d'une personne est en train de changer, un nouveau point de vue est en train d'apparaître, la lumière inonde une existence qui autrefois pouvait être terne ou sans vie - la chaleur est là au lieu de la froideur et de l'engourdissement. Cela, bien sûr, est le véritable sens de ce que nous faisons.
Je pourrais donner tout un tas d'exemples de la façon dont EFT a été une véritable bouée de sauvetage pour les gens que j'ai traités, qui avaient tout abandonné et qui se résignaient à une sorte de sous-vie - ce qui est la dépression. Mais d'autres que moi racontent si bien, dans leurs compte-rendus, leur joie d'aider quelqu'un à se dégager de sa dépression que je ne perdrai pas mon temps ici avec ces histoires merveilleusement inspirantes.
Au lieu de cela, je voudrais dire quelque chose sur les autres types de dépressions que l'on rencontre, celles qui sont dénommées "endogène" parce qu'on pense que la cause en est en quelque sorte interne vu que nous ne savons pas vraiment ce qui les provoque. Ce sont des dépressions qui ont souvent leurs racines dans les couches les plus profondes de la personnalité, parce qu'elles sont si profondément ancrées, leur origine est située si tôt dans la vie de la personne qu'en général elle est peu perceptible et vague.
Ces dépressions ont une sorte de lourdeur qui en fait une épreuve d'endurance pour le psythérapeute, quels que soient ses outils, EFT ou autre. A certains moments, celui-ci peut amener la personne à une certaine légèreté et lui permettre de se dégager de ce poids - parfois après qu'elle ait tracé son chemin en tapotant à travers toute une série d'aspects vers ce qui lui semble être un résultat merveilleux - pour constater ensuite, lors du rendez-vous suivant, que c'est comme si elle s'était effondrée, tout le bénéfice précédent ayant été balayé. C'est comme de regarder un enfant qui construit des châteaux de sable au bord de la mer, avec tant de travail méticuleux, des tours, fossés et ponts-levis, que le château semble vraiment prendre forme. Et puis les vagues arrivent et emportent tout, il ne reste que de la boue et quelques monticules de sable.
Lorsque cela arrive à l'un de mes clients, je continue d'essayer. Je travaille vraiment avec eux. J'utilise EFT avec tous mes encouragements et mon ingéniosité, et j'utilise aussi d'autres techniques quand je pense qu'elles peuvent aider. Je me sens pleine d'espoir puis découragée à mon tour. J'ai souvent besoin de tapoter sur moi-même après le départ du client pour garder le moral et continuer à le soutenir.
Mais quand cela se produit plusieurs fois, alors je comprends enfin le message. Ce que nous construisons est miné aussi vite que nous pouvons le créer. Le client peut essayer, comme moi, de venir à bout de ce jeu mais c'est comme d'essayer de retenir une avalanche, une force tellement grande que nous ne pouvons la dominer, et qui tire la personne vers le bas à chaque fois, de sorte que ce qu'on a construit avec tant de soin ne fonctionne tout simplement pas.

COMMENTAIRE DE GARY CRAIG : Bien que Pat le mentionne plus loin, je tiens à souligner que les allergènes et les produits toxiques peuvent être des contributeurs importants à un état de dépression indéracinable. J'ai vu plusieurs cas où la simple suppression d'éléments du régime alimentaire permet d'obtenir une percée majeure, et même efface complètement la dépression. Quand la dépression continue de "revenir" je soupçonne toujours que la véritable cause est une substance irritante pour le système, et généralement c'est quelque chose qui fait partie de l'alimentation courante. Dans ces cas, le "retour" est simplement une nouvelle réaction à une substance irritante.

PATRICIA CARRINGTON CONTINUE : C'est à ce moment-là, après avoir épuisé toutes les voies - y compris, si le client coopère, la consultation d'un spécialiste pour des tests de sensibilité aux allergènes et un traitement des allergies découvertes - que je me trouve profondément reconnaissante pour le fait d'avoir encore un espoir de réussite grâce à l'aide temporaire des médicaments psychiatriques prescrits par un spécialistes et devant être utilisé EN CONJONCTION AVEC la psychothérapie et l'EFT. Ceci peut paraître une hérésie aux tenants des diverses psychothérapies qui peuvent si bien fonctionner, et que j'utilise moi-même dans les cas où elles sont EFFICACES. Mais il y a une fonction importante qui peut être assumée par les médicaments psychotropes pour les dépressions, au moins à ce moment de notre histoire, quelque chose que rien d'autre ne peut faire dans certains cas. Les Prozac, Zoloft et autres Paxil, ou même à l'occasion leurs cousins plus délicats comme les IMAO, lithium, etc., sont des médicaments puissants et comme tels ils peuvent être dangereusement mal utilisés. Mais - et ce "mais" est important - ils peuvent aussi, à l'occasion, permettre de continuer le traitement et, finalement, de "sauver" une personne pour laquelle, sans cela, on aurait dû jeter l'éponge.

Je prends comme exemple ma cliente "Maria" qui est une enseignante très douée. Elle travaille avec moi depuis trois ans maintenant pour surmonter des problèmes profondément enracinés dans la personnalité, parmi lesquels une forte tendance à la dépression avec des crises de larmes sans résolution. Ceci vient, au moins en partie, de sa petite enfance où elle a souffert de la séparation d'avec une mère malade mentale souvent hospitalisée et qui la rejetait. Cette mère avait été au moins capable de donner de l'amour à sa fille quand celle-ci était bébé, mais très peu ensuite. Maria est très intelligente et fortement motivée pour surmonter ses sentiments irrationnels d'impuissance et de danger, et c'est très gratifiant pour moi de travailler avec elle. Cependant, nous avons découvert au début de son traitement que si elle faisait souvent d'excellents progrès, en travaillant même sur des noeuds fondamentaux qui étaient au centre de sa vie, grâce à l'EFT qu'elle utilise habilement (chez elle aussi), nous étions encore incapable d'enrayer la marée de la dépression. Le désespoir et la peur étaient trop durs pour elle, et pouvaient saper complètement notre travail. Et ainsi, il m'est apparu nécessaire d'obtenir pour elle l'aide de médicaments qu'elle pouvait utiliser tandis que nous tapotions sur ces problèmes en psychothérapie, avec l'idée d'éliminer progressivement le médicament dès qu'elle aurait construit sa force intérieure.
Grâce à l'utilisation du Prozac (oui - le mot "terrible" !) de façon régulière, Maria et moi avons été en mesure de faire un travail de transformation ensemble. Avec l'aide de l'EFT, elle a été en mesure d'explorer les problèmes les plus profonds, dont certains avaient une origine tellement précoce qu'ils n'avaient aucun langage, et de les résoudre un par un. Et, avec le soutien à notre travail qu'elle obtenait par la prise du médicament - lequel ne pouvait pas en soi résoudre ses problèmes mais lui permettait de travailler activement en thérapie - elle a reconstruit son "moi", elle a restructuré ses rapports aux autres et au monde, et récemment, elle a été en mesure de réduire le médicament de façon drastique, et même de le supprimer à intervalles réguliers. En ce moment, elle a encore une fois volontairement décidé de supprimer tout médicament et se porte remarquablement bien, dans une nouvelle phase passionnante de son traitement.

Je voudrais souligner que sans l'aide du médicament nous n'aurions pas pu réussir, et que, de même, si elle avait eu le médicament seul, sans la thérapie ni l'aide remarquable par l'EFT, elle n'aurait pas pu guérir - au mieux, le médicament l'aurait maintenue dans un schéma d'attente. Elle aurait probablement pu être fonctionnelle et continuer son enseignement et sa vie de famille sans s'effondrer, mais sa vraie vie, son vrai "moi" n'auraient jamais vu le jour. Donc, cela n'a pas été un système de "tout ou rien", soit le médicament soit l'EFT comme si ces deux choses étaient à l'opposé l'une de l'autre, mais quelque chose qu'on pourrait appeler "EFT assisté par le médicament", les deux modalités travaillant de concert.
Je tiens à ajouter que dans la majorité des cas où il a été nécessaire d'utiliser des médicaments avec la thérapie et l'EFT, les clients concernés ont généralement volontairement cherché à se sevrer du médicament à la première occasion. La plupart des gens ne veulent tout simplement pas rester dépendants d'une substance comme un médicament s'ils peuvent arriver à l'éviter. Parfois, ces personnes ont même quitté la drogue trop tôt, et des émotions ingérables sont apparues, que même l''EFT et la thérapie n'ont pas pu traiter assez rapidement, et ils ont dû retourner à la prise du médicament, généralement à une dose réduite, jusqu'à ce qu'ils aient travaillé sur d'autres problèmes qui étaient en attente. J'ai constaté que ce premier effort pour abandonner le médicament, même s'il ne réussit pas toujours, est généralement un signe très positif. Presque toujours, ceux qui font cet essai, même s'ils doivent recommencer à prendre le médicament, finissent un jour par s'en détacher complètement après un travail assidu. Le besoin du traitement a disparu parce que les dommages sous-jacents ont été réparés, les plaies profondes ont été guéries et la cause, pas seulement les symptômes, a été supprimée.

Je dois bien avouer que j'ai eu de temps en temps un client dépressif qui a continué à progresser dans son traitement en utilisant EFT d'une manière créative, mais qui n'a pas été en mesure de se passer de médicament, quels que soient ses efforts. Lorsque cela arrive, je ne regarde pas cela comme un échec. Si Dieu choisit de guérir cette personne en utilisant plusieurs moyens à la fois, qui suis-je pour critiquer ? Si ce que je vois dans la thérapie est un renforcement interne de la personne, un approfondissement de la paix et du bonheur dans sa vie, alors je pense que tout est bien et nous continuons à partir de là.
Le fait est que certaines personnes doivent continuer à prendre un médicament psychiatrique pour le reste de leur vie, exactement comme certains diabétiques doivent continuer à prendre de l'insuline pour vivre. Ces médicaments peuvent sauver des vies quand ils sont vraiment nécessaires, c'est à dire s'ils sont prescrits avec sensibilité et de façon experte par le médecin - c'est simplement là où nous en sommes à notre époque de l'histoire [de la psychiatrie]. Un jour, ces médicaments seront obsolètes, ils appartiendront au passé, mais actuellement il y a certains problèmes que nous n'avons pas encore résolus, certains mystères encore inexpliqués. Je trouve que la meilleure chose que je puisse faire pour mes clients, lorsque cela se produit, c'est de reconnaître cela comme un fait et "d'accepter profondément et complètement" ces personnes telles qu'elles sont. Rien que cela, en soi, peut être la meilleure thérapie possible.

Mes meilleurs vœux à vous tous,
Pat Carrington

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